Lyrics : Raphäl Yem – Photos : NnoMan – Yanis Graine – Méline – Maxwell Aurelien James – Linstable
Notre sentiment vis à vis du rassemblement devant le Tribunal de Paris, à l’appel du Comité Justice pour Adama, il y a une semaine déjà, n’a pas bougé. En un mot, il était … historique.
Parce qu’aujourd’hui, il a posé sur toutes les tables la question du rapport entre population et forces de l’ordre comme institution. Des violences policières. Du racisme systémique. Après d’incessantes demandes du Défenseur des Droits restées sans réponse, le Président Macron a finalement demandé à son équipe de se saisir en urgence de la question, leur silence étant devenu incompréhensible. Mais les annonces express du Ministre de l’Intérieur font déjà dire qu’ils auraient mieux fait de se taire. La justice, elle, vient seulement de solliciter 2 témoins dits « essentiels » dans l’affaire Adama Traoré. Dépassant l’émotion américaine, de nombreuses personnalités mainstream de notre pays avaient récemment pris la parole sur cet épineux sujet ici, chez nous, relayant ainsi les revendications citoyennes : Camélia Jordana, Omar Sy, Aïssa Maiga, Edouard Baer parmi d’autres, forçant ainsi le tempo médiatique et politique à se positionner. « Il ne faut plus se contenter d’être observateur » nous disait Assa Traoré la veille, depuis Beaumont/Oise (95) : « Si à chaque fois qu’il y avait une injustice, de la violence de la part de la police, il y avait les mêmes réactions qu’aux Etats-Unis, beaucoup de choses auraient déjà changé en France. On veut s’inspirer de leur force ».
Il faut avoir fait un stage d’observation de 3ème dans un commissariat ou avoir une tante aux RG pour se dire que nous n’étions que 20 000. Des dizaines de milliers de personnes avaient répondu présents, bravant ainsi l’interdiction de rassemblement ordonné par le Préfet de police Didier Lallement. Venus pacifiquement de toute l’Île-de-France, voire, de toute la France. Quelques fois, c’est leur première manif. Force est de constater que la foule est digne, unie, éclectique. On observe une majorité de jeunes, de racisés, autant de femmes que d’hommes. Avec une posture commune : la tête haute, le poing levé ou le genou à terre. Et des pancartes, beaucoup de pancartes : du classique « Pas de justice, pas de paix », au statut Facebook « Si vous êtes fatigués d’entendre parler de racisme, imaginez comment les gens sont fatigués de le vivre », « Les vies noires et arabes comptent » pour résonner avec « Black Lives Matter », et forcément : « I can’t breathe, again ». Beaucoup de silhouettes noires : tee-shirts, vestes, lunettes, snap ou chapeaux, sans oublier les masques de circonstance, conséquences de la pandémie. Pour signifier le deuil, la colère, l’hommage conjoint à George Floyd et Adama Traoré. Les deux hommes semblent avoir en commun de ne pas avoir survécu au plaquage ventral des agents des forces de l’ordre de part et d’autre de l’Atlantique. La foule n’oublie pas pour autant tous les autres. Aux Etats-Unis : Ahmaud Arbery en Géorgie, Michel Brown à Ferguson, Trayvon Martin en Floride ; en France : Lamine Dieng, Zyed Benna et Bouna Traoré, Amadou Koumé, Ali Ziri, Babacar Gueye, Cedric Chouviat, Zineb Redouane, Amine Bentousi, et tant d’autres …
Et récemment le jeune Gabriel, 14 ans, gravement blessé à l’œil lors de son interpellation par la police de Bondy (93). Leurs noms sont scandés avec respect tout au long de cet interminable cortège, qui s’est réuni dans le calme, semblable à celui qui annonce les victoires. Les débordements de fin de manif, immédiatement relayés par les chaînes infos qui commencent alors leurs « directs », n’auront pas suffi à éteindre la flamme, l’espoir. Dès le lendemain, des rassemblements se tiennent à travers le monde entier. Un autre, d’ampleur nationale, est convoqué Place de la République à Paris le 13 Juin.
Ils ne peuvent plus respirer : le mouvement n’a donc pas le droit de s’essouffler.
Portfolio : NnoMan
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