Un an après la première, le collectif Angles Morts a organisé ce samedi 31 mars à Paris la deuxième édition de la journée « Justice Pour Tous », point de rencontres et de transmissions des combats des familles de victimes de violences policières dans les quartiers populaires.
Paris, 20ème arrondissement. A l’entrée du siège historique de la Confédération nationale du travail (CNT), l’artiste Vince rend hommage à Angelo Garand – abattu par le GIGN en mars 2017 – en réalisant son portrait à la bombe. Au même moment à Blois, à près de deux cents kilomètres de là, une marche est organisée en sa mémoire, notamment par sa soeur Aurélie, soutenue par nombre de ces familles endeuillées. Le visage de l’homme côtoie d’autres graffs ainsi que des panneaux de l’exposition sur l’histoire de l’immigration et des quartiers populaires en France, à l’initiative de l’association L’Echo des Cités.
L’après-midi commence par la projection du documentaire « Que vaut la vie de Youssef ? ». Youssef Kaif, jeune de Mantes-la-Jolie, a été tué d’une balle dans la nuque dans la nuit du 8 au 9 juin 1991 par le gardien de la paix Pascal Hiblot. Le policier a été acquitté en septembre 2001. Sorti la même année et réalisé à l’époque par l’Agence IM’média, le Mouvement de l’Immigration et des Banlieues (MIB) et Zalea TV, le documentaire revient sur l’affaire et la mobilisation de son entourage. Un riche débat s’en suit avec des proches de victimes de crimes policiers et des militant.e.s, sur les questions des luttes pour pour la vérité et la justice, et sur leur diffusion entre les différentes générations. Sont présents plusieurs intervenant.e.s : Mahamadou Camara, frère de Gaye, jeune homme de 26 ans originaire de Champs-sur-Marne et abattu par la police à Epinay-sur-Seine le 17 janvier dernier ; Salah Zaouiya, père de Jawad, décédé le 23 juillet 1996 à l’âge de 19 ans dans l’incendie de sa cellule à la prison de Bois-d’Arcy ; Elise Languin du collectif Ali Ziri ; Samir Baaloudj, militant depuis plus de vingt ans et notamment à Bouge Qui Bouge, au MIB et au Forum social des quartiers populaires ; Mogniss Abdallah, réalisateur, fondateur de l’agence IM’média en 1983 et initiateur des concerts « Rock against police » à la fin des années 1970 ; Almamy Kanouté, activiste associatif, présent pour le comité pour Adama Traoré.
Les témoignages d’expériences et les prises de paroles successives permettent des échanges sur la mémoire de ces rapports de force, de tisser des liens et de réfléchir à des stratégies communes face aux violences policières et au système judiciaire.
Dans la même logique, la première édition d’avril 2017 avait réuni des proches des frères Abderrahmane et Adama Kamara, incarcérés suite aux révoltes de Villiers-le-Bel en 2007, d’Adama Traoré, de Lamine Dieng ou encore la famille Kraiker, qui a fondé le comité de vigilance contre les violences policières à Pantin, après avoir subi des harcèlements de la police.
Une soirée de concerts vient clore la journée, avec les rappeurs Kaiman Lanimal (Underground Conspiration) et l’apparition de Sitou Koudadjé, Fik’s Niavo de l’ex-groupe Ul’Team Atom (Sinik, Grödash…) épaulé par Templar, Saknes du groupe La Jonction, tous accompagnés de DJ Nejo aux platines, pour finir par Hartigan et le beatmaker Mani Deïz.
Tous les bénéfices de la journée sont reversés aux familles en lutte. Il est probable que l’année prochaine verra s’organiser une nouvelle rencontre du genre, pour continuer à mettre la lumière sur ces situations et les relations nouées au fur et à mesure des mobilisations.