Nous sommes un groupe de neuf jeunes de Nevers et de Roubaix, Nous travaillons principalement autour de projets liés à la thématique des droits humains. Une première visite a déjà été réalisée sur les lieux en février 2016, dans le cadre d’un travail en immersion avec les associations. Ce vendredi 23 mars 2018 nous sommes de retour à la jungle à Calais. Depuis, le terrain a été démantelé.
Lyrics : Cindie Danguis, Piruza et Emma Antonyan & Lea Migny
Photo : Pitinome
Nous avons été marqué par les changements dans la ville. A l’époque, nous avions remarqué que les migrants étaient plus nombreux, et que la ville était plus dynamique, plus vivante. La présence de nombreux migrants apportait de la vie. Aujourd’hui, nous avons trouvé cette ville triste et sombre, malgré le soleil qui inondait les rues.
A l’époque, il y a deux ans, nous avions eu le sentiment d’un espace dense, et surpeuplé, une densité qui oppressait parfois les visiteurs que nous étions. Aujourd’hui, nous nous sommes retrouvés dans une vaste étendue vide, qui nous a fait prendre conscience de la grandeur de cet espace, pourtant, nous avions l’impression de revoir à chaque instant des moments, des personnes, des scènes, vécues ici quelques mois auparavant. Des vêtements en lambeaux jonchent le sol, ou sont parfois accrochés, arrachés sur les barbelés qui quadrillent les dunes.
Partout, une multitude de carcasse de capsules de gaz lacrymogènes témoignent de la violence des évacuations et des affrontements entre habitants de la jungle et force de l’ordre. Tout dans cet espace, entre les vestiges des gaz lacrymogènes, les murs érigés, et les barbelés démontrent une totale inhumanité et un rejet de ces exilés. Cet environnement hostile nous renvoie au rejet de l’étranger, de la punition d’être d’ailleurs, car ils ne mériteraient pas, selon beaucoup, d’être parmi nous.
Sous le pont, vers la zone industrielle, plusieurs graffitis, autour de l’œuvre de Banksy, représentant Steve Jobs, fondateur d’Apple, lui même réfugié, clament « Justice », dans différentes langues. Nous avons eu le sentiment d’être comme dans une caverne, ou des humains ont laissé des traces pour témoigner de leur réalité.
De fait, ce démantèlement a conduit des centaines d’exilés à se réfugier ailleurs. Nous avons croisé plusieurs dizaines de jeunes hommes, méfiants, avec un regard dur. Ces nouveaux campements sont démantelés quasi quotidiennement. Nous avons aperçu des gens sous quelques tentes, ou réfugiés sous un buisson, autour d’un feu. Nous avons le sentiment de voir des animaux blessés, pourchassés, qui cherchent coûte la coûte la sécurité. Ces conditions sont indignes, révoltantes. Comment peut on accepter cette réalité en France, en 2018 ? Dans le pays des droits de l’homme, comment peut on traiter des hommes de la sorte, sous prétexte qu’ils sont « migrants » ?
Nous avons pu aller à la rencontre de migrants au sein d’un accueil de jour du secours catholiques. La bas, nous avons rencontré un jeune érythréen qui dessinait une colombe, signe de paix. Il s’appliquait parfaitement, afin que son dessin soit parfait. Un symbole de ses aspirations.